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    Bienvenue

     

    Je vous souhaite la bienvenue en ces pages. Vous allez découvrir une histoire de mon cru, illustrée à l'aide des Sims 3.

    Aventures, mystères, amours, passions et désillusions seront au rendez-vous dans cette histoire d'inspiration fantasy.

    Je tiens à vous prévenir dès maintenant : ceci est une histoire adulte, il y aura donc du contenu ne convenant pas aux plus jeunes. Attention, donc !

    Venez découvrir les péripéties d'un groupe d'aventuriers "au service du Prince".

    Isisaur


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  • Chapitre 1 : Emily O'Brooke

    Le soleil se levait paresseusement sur l’horizon, faisant étinceler la mer de mille éclats. C’en était presque aveuglant. La vue était magnifique, mais après quatre levers de ce type, je commençais à être blasée. La beauté, c’est bien joli, mais la contempler à longueur de temps sans avoir rien d’autre à faire, merci bien ! Très peu pour moi ! Je me sentais comme un lion en cage, attendant que quelque chose, n’importe quoi, bouge.

    Bien sûr, je n’avais pas à me plaindre du cadre, c’était bien au-dessus de ce à quoi j’étais habituée. Ma suite, comportant une chambre immense et une salle d’eau avec toutes les commodités, était du dernier luxe. J’avais à ma disposition une bibliothèque fournie et du vin exquis à discrétion. Mais l’oisiveté n’était pas mon fort, je n’étais bien que dans l’action. Or, quatre jours sans action et je m’étiolais comme une fleur en fin de vie.

    Et ce maudit serviteur qui m’assurait chaque jour que j’obtiendrais bientôt audience auprès du roi Karl.

    Le roi Karl Sarrow régnait sur l’opulent royaume de Frygnonn avec une main de velours. Il était réputé pour sa magnanimité et son sens aigu de la justice. Mais il était aussi un personnage fort occupé, à en juger par le temps qu’il me faisait perdre depuis le début de la semaine. C’était pourtant lui qui avait fait appel à moi, alors que je savourais la fin d’un contrat bien juteux.

    Chapitre 1 : Emily O'Brooke

    Un contrat d’une simplicité enfantine à la vérité. Mon commanditaire voulait juste qu’un de ses « clients » apprenne l’humilité et l’obéissance. Rien de bien sorcier pour moi. J’étais arrivée avec nonchalance dans la petite boucherie, demandant à voir Maître Gloume. Par chance, il était seul, et pas méfiant pour deux sous, le bougre. Je n’avais eu aucune peine à me faire inviter dans l’arrière-boutique. Il faut dire que le vieux pervers ne devait pas avoir l’habitude qu’une jeune demoiselle succombe à ses  charmes  vieillissants. Le pauvre voyait déjà l’affaire dans son sac ! Il n’avait pas vu venir le premier coup, et les suivants le laissèrent abasourdi. C’est que je sais frapper là où ça fait mal, ayant acquis ce don dans les diverses bandes des rues dont j’avais fait partie.

    Il n’avait pas été long à dresser. Au bout d’une demi-heure de mon traitement spécial récalcitrant, il m’avait suppliée à genoux et m’avait même offert un petit bonus en jurant qu’il serait à l’avenir plus docile. J’avais à peine transpiré ! D’une simplicité enfantine, quoi, le contrat rêvé.

    Mon commanditaire m’avait bien payée et le supplément de maître Gloume venait arrondir ma bourse déjà bien garnie. J’avais le vent en poupe, Frygnonn était un royaume prospère et ses riches marchands, sous des dehors bonhommes, avaient besoin de mains discrètes pour accomplir leurs sales besognes loin des regards de la garde royale. Une aubaine pour une femme comme moi. Depuis que j’avais investi la capitale frygnonnaise, la fortune me souriait et je m’étais fait une belle réputation dans les bas-fonds de Cambuz. Mon carnet de bal était plein et je peinais à trouver du temps libre pour profiter de mon pécule.

     

    Chapitre 1 : Emily O'Brooke

    Mais ce soir-là, je comptais bien décompresser et m’offrir un petit moment de détente. J’avais trouvé une auberge accueillante, proprette et offrant des services fort intéressants. J’avais commencé ma soirée par une petite tournée de cervoise bien fraîche. La boisson s’écoulait en moi au rythme de la musique qu’un ménestrel jouait pour le plaisir de quelques esthètes, tentant avec peine de couvrir le brouhaha des exclamations d’ivrognes patentés et des rires hauts-perchés des filles de joie.

    Après quelques chopes sirotées seule dans mon coin, j’étais montée dans ma chambre avec un éphèbe  que le tavernier m’avait chaudement  recommandé. Il était réputé pour ses mains délicates et ses massages renversants. Un véritable artiste, ma petite dame, m’avait assuré le bonhomme.

    Une fois dans ma chambre, j’avais vite constaté que l’aubergiste n’avait pas menti sur la marchandise. Je m’étais laissée oindre des épaules jusqu’aux pieds d’une huile aux parfums capiteux. La sensualité que le jeune homme avait mise dans les circonvolutions tactiles de ses mains m’avait enivrée aussi sûrement qu’un grand cru capiteux. Il avait su dénouer mes muscles endoloris et délasser mes membres  ankylosés par un travail un peu physique. Il était arrivé au point stratégique de mes fesses quand on avait toqué à ma porte.

    Le tavernier, embarrassé par son intrusion intempestive, sentant bien qu’il interrompait le moment fatidique, m’avait appris qu’un coursier royal fort impatient avait demandé après moi, assurant de l’urgence de son message pour Dame O’Brooke. En poussant un soupir résigné, j’avais renvoyé mon éphèbe déconfit et accepté de recevoir l’émissaire. Un courrier du roi ne saurait se refuser et j’avais appris à ne pas me faire remarquer et à nager dans le sens du courant. C’est primordial dans mon métier, savoir faire le dos rond et accepter, en apparence du moins, les désirs de l’Autorité.  

    Chapitre 1 : Emily O'Brooke

    Le messager, ayant toutes les peines du monde à éviter de détailler ma tenue légère, une simple serviette ceinte autour de ma poitrine, m’avait délivré une lettre très courte quoique formelle, m’invitant au palais du roi Karl de Frygnonn afin de discuter d’une affaire d’Etat requérant mes précieux services.

    J’en étais restée comme deux ronds de flanc, puis j’avais senti un sourire carnassier naître sur mes lèvres. Le roi Sarrow qui avait besoin de moi ?! C’était la chance d’une vie pour qui voulait s’enrichir vite et se faire un nom à toute épreuve ! Le messager avait attendu ma réponse en se tortillant d’un pied sur l’autre pour éviter de regarder mes jambes dénudées, je n’avais eu qu’à donner mon accord pour qu’il prît congé, visiblement soulagé et non sans m’indiquer que je devrais me rendre au château dans les plus brefs délais.

    Avant de faire route pour le palais inconnu, j’avais tout de même fait rappeler mon masseur, histoire de terminer la nuitée en beauté.

    Et j’attendais depuis quatre jours le bon vouloir royal, rongeant mon frein, m’interrogeant sur ma présence en ces murs luxueux et m’énervant de cette inactivité forcée. Dans mon milieu, quatre jours, c’était énorme, je perdais des contrats, je perdais des clients et je perdais de l’argent. ça me faisait enrager !

    Chapitre 1 : Emily O'Brooke

    Mais ça n’allait pas se passer comme ça. Mon quota de patience avait atteint ses limites restreintes et je comptais mettre un terme à ce statu quo horripilant. Quand le serviteur détaché à mon service arriva, je l’agressai de mon ton le plus autoritaire, lui lançant un ultimatum : ou le roi me recevait, ou je partais sans me retourner. L’homme, ne perdant pas son flegme, tenta de m’apaiser, mais je ne lui laissai pas l’occasion de parler. Quand ce que j’avais sur le cœur fut enfin dit, essoufflée, je repris mon souffle et le bougre en profita pour me dire d’un ton calme qu’il était justement venu m’annoncer mon introduction immédiate auprès du roi Karl.

    Enfin, j’allais le rencontrer, ce monarque capricieux qui me faisait perdre mon temps ! J’essayai de me calmer un tant soit peu afin de faire bonne figure et suivis le serviteur dans un dédale de couloirs éclairés de chandeliers en or massif.

     


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  • Chapitre 2 : Felipe Saladino

    Chapitre 2 : Felipe Saladino

    J’étais installé bien au chaud, attendant la venue du roi. Son invitation m’avait laissé perplexe. Cela faisait déjà un an que j’avais sollicité son aide pour mon… petit problème et je n’avais eu aucune réponse. Jusqu’à ce que l’estafette royale me convie au palais du roi Karl, quatre jours plus tôt.

    Chapitre 2 : Felipe Saladino

    La convocation avait-elle un rapport avec mon affaire ou bien s’agissait-il de toute autre chose ? Et dans ce dernier cas, de quoi pouvait-il bien être question ? Mes interrogations commençaient à me prendre sérieusement la tête. Je n’étais pas d’une nature inquiète – en général – mais l’affaire qui m’intéressait était sérieuse et s’attachait à mon avenir.

    J’espérais sincèrement que le roi Sarrow avait enfin décidé d’intercéder en ma faveur auprès de son homologue régnant sur Espourt. L’exil commençait à me peser. Oh, je trouvais à m’occuper sans mal, entre les parties de dés avec les marins du port, les parties fines avec les filles des tavernes et les prises à partie des ivrognes bagarreurs de tout poil. Je vivais correctement, jonglant entre les moments de chance qui me permettaient de confortables extra et les épisodes de malchance durant lesquels les dés ne suffisaient pas à combler mes attentes. Je devais alors trouver d’autres sources de revenus, mais je m’en sortais bien, les riches dames et damoiselles n’étaient pas très farouches à Cambuz et très généreuses quand on savait s’y prendre.

    Non, ma vie était somme toute bien agréable pour un exilé politique, mais c’était une existence pleine d’imprévus et j’aimais le confort d’une vie bien établie. Mon pays me manquait, les filles de mon pays me manquaient, les tavernes de mon pays me manquaient et plus que tout, mon manoir et mon titre me manquaient ! Ici, je n’étais personne, juste un noceur lambda parmi tant d’autres. Là-bas, j’étais archiduc, respecté par mes pairs, dirigeant mon propre domaine, envié par tous les nobliaux de rang inférieur… Ah, cela me manquait tant !

     Chapitre 2 : Felipe Saladino

    Je secouai la tête, balayant cette mélancolie embarrassante. Pour l’heure, j’étais dans ce salon confortable, quelques friandises à portée de main, en compagnie de deux individus fort intrigants. Je m’intéressai un instant au sauvage à moitié nu qui croisait les bras d’un air revêche. Il était proprement effrayant avec ses biceps saillants, ses tatouages tribaux, sa peau cuivrée, et cette crête improbable qui ornait son crâne. Un sauvage, un étranger taciturne qui n’avait même pas pris la peine de me saluer quand j’étais entré dans le boudoir. Je n’aurais pas voulu le croiser au coin d’une ruelle sombre, ni même le défier au bras de fer. Il était inquiétant, à se tenir ainsi, immobile et muet à côté du buffet de douceurs aux odeurs alléchantes, sans s’émouvoir du luxe qui l’entourait. A croire que rien ne pouvait atteindre ce colosse à l’armure invisible. Qui donc pouvait-il être ? Et surtout, pourquoi était-il ici, en ma présence ?

    Un invité du roi ? Inconcevable ! Et pourtant, il devait bien y avoir une raison à sa présence. Je ne m’attardai pas plus sur le mystérieux personnage, j’en saurais certainement plus en temps voulu.

    Mon regard se posa alors sur l’élégante croupe d’une charmante damoiselle. Elle admirait les faïences royales d’un air joyeux, me laissant tout loisir pour que, moi, j’admire sa plastique alléchante. Une taille fine, des hanches étroites mais néanmoins féminines, un cou gracieux comme celui d’un cygne. Sa peau, foncée, ne laissait pas présager d’une haute naissance, mais qu’importe, après tout : elle avait d’excellentes manières et sa robe, quoique simple, la mettait en valeur.

    Quand j’avais croisé son regard, à son arrivée, un regard bleu-vert d’une limpidité incroyable, j’avais eu une étrange impression, comme si ces yeux ne m’étaient pas inconnus, j’avais eu la sensation électrisante que ces bulles de pureté m’avaient déjà regardé, naguère. Ça avait été fugace, un sentiment de déjà-vu, mais ça m’avait laissé pantois. Moi, toujours à mes aises auprès de la gent féminine, j’étais resté muet devant la femme au sourire espiègle, tel un damoiseau rougissant de ses premiers émois ! C’était incompréhensible.

    A présent qu’elle me tournait le dos, je reprenais contenance, rassemblant mes esprits et affûtant ma verve légendaire. Je me demandai quelle serait la meilleure manière de l’aborder quand la porte s’ouvrit, laissant apparaître une créature plus à ma portée.

     Chapitre 2 : Felipe Saladino

    La belle, chevelure courte flamboyante, yeux verts et vifs, éphélides d’une joliesse attendrissante, s’avança avec assurance dans la pièce et jaugea l’assistance d’un air intrigué. Elle ne s’était manifestement pas attendue à une telle assemblée. Sa tenue ne cachait rien de son anatomie avantageuse. J’aimais les femmes habillée en homme, c’était mon péché mignon : les culottes mettaient en valeur la longue ligne charnue des jambes, dévoilant des délices d’ordinaire cachées par les jupes évasées. Et cette femme avait de fameux fumerons, mes aïeux !

    Délicatement musclées, fuselées à souhaits, ces jambes promettaient des jeux pour le moins acrobatiques. Je levai nonchalamment les yeux, conscient de mon regard insistant, mais pas le moins du monde gêné, et scrutai plus attentivement son visage volontaire. Elle, j’étais certain de l’avoir vu quelque part, et récemment. Un visage pareil ne s’oubliait pas…

     Chapitre 2 : Felipe Saladino

    Merci à Solledade qui joue la tenancière de l'auberge.

    Soudain, la lumière se fit dans mon esprit. A la taverne ! Je l’avais vue à la taverne, quatre jours plus tôt !

    Ça avait été une fameuse soirée, bien arrosée ! J’avais délesté la bourse de quelques trappeurs lors d’une partie de dés mémorable. Il faut dire que la beauté accrochée à mon bras m’avait porté une sacrée chance ! L’assistance était joyeuse. Ça chantait, ça dansait, ça buvait, ça vociférait. Les hommes se rapprochaient des serveuses, les serveuses lançaient des œillades aguicheuses. C’était un beau raffut qui régnait à l’intérieur de la taverne surchauffée. 

     Chapitre 2 : Felipe Saladino

    Merci à LadySquirrel qui joue la serveuse.

    Installée seule au fond de la salle, observant en silence les fêtards, la belle rousse sirotait son godet avec satisfaction. J’avoue, je ne m’étais pas attardé plus que ça sur elle, bien trop occupé que j’étais avec la donzelle délurée assise sur mes genoux, qui me susurrait des mots doux à l’oreille et me promettait mille découvertes exotiques en sa compagnie. J’avais enregistré la présence de la mystérieuse femme en culottes, puis je ne m’y étais tout simplement plus intéressé. Mon cerveau marchait comme ça : il observait des détails sans que je fasse d’effort particulier, il archivait et passait à autre chose. Plus tard, si j’en éprouvais le besoin,  je pouvais récupérer les informations sans peine. 

     Chapitre 2 : Felipe Saladino

      Merci à Caroline qui joue la compagne d'un soir de Felipe.

    Je n’avais pas prêté attention à la rouquine, ce soir-là, mais je savais quand même qu’elle était montée à l’étage dédié aux chambres accompagnée d’un garçon imberbe, un gars de la taverne qui avait son petit succès auprès des rares dames qu’on croisait en ce lieu réputé, mais aussi auprès de quelques clients réguliers aux mœurs… quelque peu différentes des miennes. Quoi qu’il en fût, elle était montée au bras de cet éphèbe et je ne l’avais plus vue de la soirée. Je n’avais d’ailleurs guère tardé après ça, la gourgandine collée à mon bras semblait pressée de passer aux choses sérieuses. Malheureusement pour elle, nous n’avions pas pu aller plus loin que le pied de l’escalier, l’estafette royale ayant choisi de m’intercepter à ce moment-là. Intrigué par l’invitation royale, rendu fiévreux par la possibilité que ma situation s’arrangeât enfin, j’avais laissé là la jouvencelle, non sans lui promettre de revenir la voir à la première occasion – elle semblait si prometteuse, la drôlesse ! J’avais plié bagage le plus vite possible et pris mes dispositions pour que mes malles me suivent sans encombre et je m’étais présenté au palais.

    J’aurais finalement pu rester tranquillement à l’auberge et honorer ma charmante compagne, mon empressement n’avait servi à rien, puisque je n’avais pas encore vu le roi, après quatre jours d’attente interminables. Je commençais à trouver le temps long, à ronger mon frein dans l’incertitude la plus totale quant à mon avenir proche. Mais l’attente en avait finalement valu le coup, rien que pour les mystères que m’offrait le roi en me faisant patienter en compagnie d’individus aussi… étranges dans leur mise ou dans leur attitude.

     Chapitre 2 : Felipe Saladino

    La rouquine était un de ces mystères que j’aurais bien aimé exploré plus profondément. Ses yeux verts étaient deux joyaux dignes des plus beaux trésors et je me serais bien vu y plonger pour un doux moment de volupté. N’y tenant plus, je me levai et me présentai à la beauté :

    - Madame, soyez la bienvenue dans ce salon. Je suis Felipe Saladino, archiduc et ancien conseiller du roi Aldric Morrdon, du Royaume d’Espourt, et votre serviteur. Puis-je vous conduire jusqu’à ce fauteuil pour que vous preniez vos aises ?

    La donzelle eut un petit sourire hautain avant de répondre d’une voix délicieusement grave:

    - Je peux très bien m’y conduire seule, Messire. Gardez vos manières pour vous et je serai tout à mon aise.

    Et sans ambages, elle me contourna et alla prendre place en face de la cheminée. Je crus entendre un rire étouffé provenant de la deuxième fille, mais je me drapai dans ma dignité et n’y fis pas attention. Le colosse, quant à lui, n’avait pas bronché, comme perdu dans un monde invisible.

    Je retournai à ma place et croisai les bras, tentant de capter le regard dur de celle qui venait de m’éconduire aussi inconsidérément. Ce qu’elle ne savait pas, c’était qu’il m’en fallait plus pour me refroidir. En agissant ainsi, elle n’avait fait que piquer mon désir, la gueuse ! 

    Chapitre 2 : Felipe Saladino

    Je la fixai depuis un moment déjà quand la porte s’ouvrit de nouveau, laissant place à une autre damoiselle, bien différente de la précédente. Je ne m’attardai pas longtemps sur sa silhouette maigrichonne, les jouvencelles à peine formée n’étaient pas ma marotte. La jeune fille avait pourtant une drôle d’allure qui aurait eu de quoi exciter ma curiosité s’il n’y avait eu la rousse piquante. Elle était vêtue à la bohémienne ; ses cheveux si blonds qu’ils en étaient blancs cascadaient librement sur ses épaules menues ; ses yeux avaient quelque chose de dérangeant, d’insaisissable, d’effrayant même. Et pourtant, il s’agissait d’une toute jeune damoiselle, elle ne devait pas avoir plus de quinze ou seize printemps. Mais son attitude désinvolte, sa façon de regarder les autres sans détour firent que je me sentis tout petit en sa compagnie. Étrange  pour le moins ! Le colosse sembla lui aussi saisi par l’apparition. Il la regarda avec un air enfin intéressé, un je-ne-sais-quoi pétillant au fond de sa prunelle noire. Finalement, l’homme n’était pas fait de bois; mais qu’il s’animât pour une pucelle innocente alors qu’il était manifestement entré dans la phase des hommes mûrs m’emplit d’une grande méfiance à son égard. Je décidai sur-le-champ de le garder à l’œil. J’avais horreur de ces vieux-beaux friands de chair fraîche. Batifoler et lutiner, oui, mais avec classe et honneur, que diable !

    La damoiselle fit une ravissante révérence et lança à la ronde :

    - Le roi Sarrow sera là d’ici quelques instants. Votre attente va s’achever.

    Je regardai la jouvencelle d’un œil nouveau. Une petite bohémienne annonçant un roi, quel étrange protocole. Cela avait de quoi épaissir encore le mystère entourant cette entrevue prochaine. Mais je ne pus laisser mes pensées s’interroger plus avant, car la porte s’ouvrit de nouveau, laissant place au monarque.

    Enfin, j’allais savoir de quoi il retournait, apparemment en même temps que tous ceux présents dans la pièce.


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  • Chapitre 3 : Jenko RokaltChapitre 3 : Jenko Rokalt

    Ça faisait deux bonnes heures que j’attendais dans cette pièce du château dans lequel on m’avait conduit. Le roi semblait être un homme fort occupé. Depuis le temps que je côtoyais les habitants d’Eurion, ce grand continent aux mœurs si différentes de mon peuple, j’avais appris que les rois étaient des personnages importants, qui se croyaient supérieurs aux autres : une attitude parfaitement irrationnelle quand on pensait que ces monarques accédaient au trône non pas par leur mérite mais par leur naissance ! Ils étaient vraiment tordus, les  sujets, pour accepter d’être traités comme des êtres inférieurs. Là d’où je venais, personne n’était au-dessus de son voisin, et ça fonctionnait très bien. Dans le village, on avait besoin de chacun pour que l’harmonie règne, tous les talents étaient aussi importants les uns que les autres. Un forgeron tel que moi ne serait rien sans le charbonnier ou le bûcheron. De même, un maréchal ferrant ou un paysan ne feraient pas grand-chose sans un forgeron. Et la chaîne des besoins pouvaient aller loin ainsi. Nous avions tous besoin les uns des autres et personne ne se serait permis de se croire supérieur à l’autre. À quoi bon ?

      À vrai dire, je ne comprenais pas vraiment à quoi servait un roi. Et je n’avais pas trop osé demander aux autochtones. Ils me regardaient déjà d’un air assez méfiant, me toisant et riant dans mon dos. Oh, jamais en face, ils n’étaient pas assez courageux pour cela. Mais j’avais déjà entendu un bel assortiment de mots désobligeants à mon égard. Barbare était encore le moins dévalorisant. Je savais quelle estime ils portaient à ma terre natale, le continent Ammpourli, peuplé de sauvages sans la moindre culture, des idiots vivant comme des animaux, bref des demi-hommes sans civilisation. Pourtant, ils ne rechignaient pas à commercer avec ces sauvages, ils appréciaient cet artisanat primitif. Oh bien sûr, Ammpourli avait son lot de sauvages et d’êtres immondes, sans aucun cœur et vivant pour semer la mort et la désolation. Ces chiens de Hirsuds, entre autres ! Ceux-là avaient perdu le droit de s’appeler hommes depuis longtemps : ils pillaient, violaient, tuaient, dévoraient leurs semblables sans état d’âme. C’était leur façon de vivre : tuer pour le plaisir.

    Tuer était parfois nécessaire, pour défendre les siens, sa vie et ses biens… Pour se venger aussi quand il ne nous restait plus rien d’autre, que la vie n’était plus supportable que dans cette quête sans fin. Ah, si je ne savais pas de source sûre que ma douce Niou n’avait pas péri ce jour-là, douze ans plus tôt, je serais en train d’exterminer ces rats sans battre un cil ! Mais ma vengeance devait attendre. Tant qu’il me resterait un souffle de vie, je serais condamné à errer à la recherche de quelques informations pouvant éventuellement me conduire à ma Niou.

    Je savais qu’elle avait été emportée au-delà des Mers, sur ce continent étrange où j’étais à présent, Eurion. Elle était belle Niou, et jeune… Parfaite… Oui, parfaite pour être vendue comme esclave à ceux qui se disaient civilisés. Je préférais ne pas penser à ce qu’elle avait pu subir en douze années d’esclavage. Je ne pouvais pas me permettre d’imaginer ces sévices inimaginables. Je devais être fort et continuer. J’avais traversé tant de terres étrangères, tant de pays étranges. Les habitants semblaient tous si insensés, achetant comme des biens des hommes, des femmes et des enfants, traitant leurs semblables – des gens de leur tribu – comme des bêtes, certains vivant dans un confort écœurant pendant que d’autres mouraient la gueule ouverte de faim ou de froid. Ils étaient pour la plupart méchants et petits, intolérants et méfiants.

    Chapitre 3 : Jenko Rokalt

    Les premiers temps, j’avais essayé de sympathiser, ou du moins d’avoir des rapports cordiaux avec certains d’entre eux… Peine perdue ! Je n’avais essuyé que des regards méprisants, au mieux. Mais parfois, les réactions étaient plus violentes encore. Certains avaient même tenté de me capturer, espérant vendre à prix d’or un grand gaillard venu d’ailleurs !

    Les habitants de Frygnonn, quoiqu’un peu plus pacifiques que certains autres royaumes d’Eurion et ne pratiquant pas officiellement l’esclavage, avaient d’énormes aprioris, et je le savais. Il fallait faire avec, c’était ainsi. Mon accent à couper au couteau, ma tenue de barbare, dont je ne pouvais me défaire, mes manières rustres ne trouveraient jamais grâce à leurs yeux.

    C’était pourquoi j’avais été étonné par l’invitation du roi. Un palais d’Eurion n’était pas un lieu facile d’accès pour les étrangers. Alors y être invité relevait du miracle. Deux jours plus tôt, j’avais été abordé par un messager, un homme à la solde du roi, un serviteur, ni plus ni moins. J’étais au marché de Cambuz, admirant quelques armes d’excellente facture. On pouvait critiquer les mœurs de ces hommes mais ils avaient des artisans talentueux et leur façon de créer des objets me fascinait. Une piste m’avait conduit jusque dans la capitale. Certaines tavernes ne rechignaient pas à acheter des êtres humains pour… pour… Rien que d’y penser, je me sentais révulsé. Non, ça ne pouvait être vrai. Ma jolie Niou ne pouvait être dans un tel lieu de débauche. J’espérais… Quoi ? Difficile à dire. Qu’elle soit là, dans une auberge miteuse en train de subir les assauts honteux d’un marchand bedonnant et que je puisse enfin la retrouver ? Qu’elle ne soit pas là, qu’elle n’ait pas été vendue comme esclave sexuelle et que je me retrouve encore bredouille ? Je commençais à perdre espoir. Douze ans à la chercher.

    Chapitre 3 : Jenko Rokalt

    Douze ans à sillonner Eurion de long en large, à interroger les marchands, les taverniers, les voyageurs. Elle ne passait pas inaperçue, pourtant, Niou, avec son tatouage tribal et sa beauté sauvage. J’avais rencontré des personnes qui avaient cru la voir, qui m’avaient certifié qu’elle avait embarqué pour le nouveau continent, qu’elle avait été vendue dans un marché d’Espourt. J’avais suivi plusieurs pistes, certaines fausses, d’autres plus vraisemblables. Mais je n’étais sûr de rien. Et si elle était… morte… ? Rien que de formuler cette pensée, j’en perdais le souffle. Elle était ma seule raison de respirer encore. Je ne vivais que pour la retrouver.

    Je commençais à perdre doucement espoir, grignoté par les ans passés sur la route. A présent, les pistes étaient de plus en plus fragiles, de simples fils ténus, presqu'invisibles et partant dans tous les sens. J'en étais venu à accepter des contrats de mercenaires (retrouver des détrousseurs de grand chemin ou suivre les traces d'un fugueur, ce genre de missions) en espérant trouver quelqu'un ayant de réelles nouvelles de mon épouse perdue. Et à part cette rumeur à propos de l'auberge, qui s'était révélée fausse, je n'avais rien, pas l'ombre d'un indice. Je me demandais souvent combien de temps encore je me sentirais obligé de battre les sentes ainsi. Quand donc me sentirais-je libre de retourner dans ma patrie, sur Ammpourli, pour venger les miens et semer la destruction chez les monstres Hirsuds ?

    Pour l'heure, j'avais accepté l'invitation de celui qu'on appelait roi, intrigué malgré moi. Je n'avais pas été seul à être convié, apparemment, mais ça m'était bien égal. tout m'était égal, à bien y réfléchir, mon cœur était resté au pays, enfoui avec le corps. Son corps, si petit et mutilé odieusement, vide de toute sa joie, de toute son espièglerie et de son innocence. Enfoui dans les tombes que j'avais creusé seul, pendant trois jours durant. Tous morts, seules les plus belles femmes en avaient réchappé, je suppose pour être vendues à prix d'or, ma Niou parmi elle, évidemment : elle était la plus belle de toutes. Seules les femmes en avaient réchappé, oui, emmenées comme esclaves, et moi, laissé pour mort, seulement blessé et oublié dans un coin.

    Les souvenirs de tous les corps de mes vaillants voisins, de ces enfants, de ces vieillards, de ces hommes étaient mes seuls compagnons depuis douze longues années d'errance. Les beaux souvenirs eux, malheureusement, s'effaçaient chaque jour un peu plus. j'avais le plus grand mal à évoquer son visage me souriant avec candeur ou encore le son de sa voix quand elle babillait à côté de la forge, jouant avec des cailloux et m'appelant Pa... Non, vraiment, je ne pouvais plus voir son visage, il était flou maintenant.

    Je secouai la tête virulemment, mes pensées ennemies m'enfermaient dans un monde de cauchemars et je n'avais pas besoin de ça, pas maintenant que j'étais enfermé dans une pièce étouffante avec ce petit homme vêtu de soieries ridicules à l'air hautain et ces deux femmes bizarres chacune dans leur genre : l'une ne faisait que lancer des sourires à la ronde perdue dans son monde et l'autre semblant fort peu aimable (bien qu'elle eût mouché le morveux brun de façon fort cocasse, pour ce que j'en compris, ils parlent tellement vite et leur langue est tellement compliquée parfois).

    Chapitre 3 : Jenko Rokalt

    Je revins au présent juste au moment où une jeune fille entrait dans la pièce. Mon cœur manqua un battement à son apparition. Elle devait avoir à peine seize ans, tout juste l'âge qu'elle aurait à présent si... La jeune fille me renvoya immédiatement à l'image que je me faisais, la nuit, d'elle, quand le sommeil me fuyait. Et pourtant, à première vue, elles n'auraient rien en commun ! La nouvelle venue était très pâle, sa peau pratiquement translucide, de grands yeux aux reflets violet, une épaisse chevelure blanche, des épaules menues, un visage enfantin plein de douceur. Elle, elle n'aurait pas eu ce physique, à coup sûr : sa peau cuivrée, ses cheveux noirs et crépus, son petit corps charpenté qui promettait une vitalité à toute épreuve, ses yeux bruns pétillant de malice. Elles étaient à l'opposé l'une de l'autre, indéniablement. Et pourtant...

    Il se dégageait de la jeune fille une aura d'innocence incroyable, une pureté déconcertante qui empoigna mon cœur et l'enroba d'un étrange sentiment... d'appartenance. Elle posa son regard violet sur moi et je me sentis fondre. Désormais, je me savais lié à elle, par un lien invisible et pourtant indestructible. Quoiqu'il pût arriver, je savais une chose : elle, je la protègerais, envers et contre tout. J'y étais obligé par... par un pouvoir irrésistible. La jouvencelle me rappelait ma fille, d'une façon incompréhensible et avec une telle intensité que j'en eus un frisson irrépressible. C'était comme si le temps s'était arrêté juste pour moi, les autres continuant d'évoluer sans que rien ne changeât pour eux, mais moi, je me transformais sous leurs yeux sans qu'ils s'en rendissent même compte. La peine et la fureur, quoique toujours présentes et ardentes en moi, se retrouvaient acculées dans un coin sombre de mon coeur pour laisser place à un nouveau sentiment : cette fille était importante, pour moi, mais surtout pour le monde, et mon devoir était de faire en sorte que rien ne lui arrivât de désagréable. Ce que je n'avais pas été capable la première fois, je le ferai à coup sûr cette fois... Elle était comme une seconde chance, tout simplement.

    Chapitre 3 : Jenko Rokalt

    Et puis d'un coup, tout se remit en marche, le temps reprit son cours et je m'aperçus qu'un homme était entré pendant... le phénomène et que les autres étaient... penchés ? Drôle d'idée, tiens ! était-ce pour accueillir le nouveau venu ? Bizarre, vraiment ! Enfin, l'homme, un roux habillé richement et portant... quoi ?... un objet en or sur la tête, insistait déjà pour que tous se relevassent. Enfin un peu de bon sens ! Il embrassa la pièce d'un regard bienveillant et prit à nouveau la parole :

    - Mes amis, je suis enchanté que vous ayez tous répondu présent à mon invitation. Et je suis sincèrement désolé d'avoir fait attendre certains d'entre vous. Mais vous deviez être au complet afin que je vous dise le fin mot de l'histoire.

    Il se tourna vers le bellâtre brun :

    - Messire Felipe, je suis ravi de faire votre connaissance. J'ai tellement entendu parler de vous !  en bien, la plupart du temps, je vous rassure ! J'ai vu la princesse Arabella très récemment, elle est resplendissante et le mariage lui va à ravir.

    Et il partit d'un rire franc. L'interpelé, lui, fit une drôle de tête, comme s'il avait avalé un poisson avarié. Rien que pour ça, le roi, car il devait s'agir de celui qui nous avait tous convoqué, à n'en pas douter, me sembla très agréable. Il se tournait désormais vers la brune rieuse.

    - Dame Inina, je suis ravi que vos fonctions auprès de mon très estimé ami Aldric Morrdon vous aient permis de me rendre visite. Comment se porte le roi et sa cour ? Sa fille Arabella n'a pas été très loquace à son sujet. Certainement avait-elle du mal de se remettre de... son aventure de l'année dernière ?

    Il lança un clin d'œil au dénommé Felipe et sans attendre de réponse se tourna vers moi :

    - Maître Rokalt, c'est un honneur vous rencontrer enfin. J'ai entendu le plus grand bien de vous et votre réputation vous précède. Vous choisissez toujours des missions honorables et cela m'agrée au plus haut point, mon ami !

    Je baissai humblement la tête, agréablement surpris par l'attitude de Karl Sarrow qui passait déjà à une nouvelle personne, la rouquine incendiaire :

    - Dame O'Brooke, bienvenue chez moi. J'espère que vous accorderez toute votre attention à l'affaire qui m'intéresse. Vos talents sont exceptionnels, d'après certaines sources.

    Enfin, son regard toucha la jeune fille. je mourrais d'envie d'en savoir plus sur elle.

    - Dame Beauregard, merci d'avoir fait un si long chemin pour entendre ma requête. Vous savez déjà plus ou moins de quoi il retourne mais je vous invite à nous suivre fin d'avoir tous les détails. Si vous voulez bien me suivre, chers amis, nous allons passer dans la salle du Conseil. Mon épouse et mon Premier conseiller nous y attendent déjà. Vous saurez alors pourquoi je vous ai invités et pourquoi tant de mystère. Je vous en prie, suivez-moi.

    Et il passa dans la pièce voisine, chacun de nous lui emboîta le pas. J'étais intrigué par ce roi accueillant et agréable, bien loin de l'image arrogante que je m'étais faite de lui. J'entrai le dernier dans la salle du Conseil. Nous y attendaient en effet un homme et une femme vêtus de riches atours selon la mode frygnonnaise.

     

     


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